Ce que devrait être le répit des Aidants

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Je ne reviendrai pas sur les limites financières ni sur les limites de public-cible des « ayants-droits » au répit prévu par la loi « Autonomie ». Celles-ci ont été largement commentées tous ces derniers temps.
Ces limites du droit au répit sont les plus visibles – mais non les seules – et dans l’immédiat, faute de moyens, il sera difficile de les repousser.

En revanche, sur le plan qualitatif, de nombreuses améliorations peuvent être apportées au répit des Aidants, dès lors que l’on parle du répit sous la forme de l’hébergement temporaire, de l’accueil de jour ou de l’accueil de nuit.

Le dispositif actuel, dans sa globalité, présente des inconvénients qui expliquent qu’il n’est pas toujours utilisé pleinement par les Aidants (1).

Ce système de répit (plate-formes, accueils temporaires…) s’est construit historiquement en référence à la maladie d’Alzheimer.
S’il est vrai que les Aidants de patients affectés par la maladie d’Alzheimer sont parmi les plus éprouvés par l’aide qu’ils apportent, ils ne sont cependant pas les seuls à supporter un lourd fardeau : les Aidants de malades de Parkinson, de Sclérose en plaques ou de cancer vieillissants, subissent des conséquences physiques et psychologiques très importantes, sur une durée d’accompagnement souvent très longue.
Et pourtant le système de répit, tel qu’il est conçu actuellement, ne peut pas répondre à leur besoin.

Mais au-delà des avantages et inconvénients du système actuel, on peut interroger la notion même de répit… et son efficacité.
Le résumé d’une étude financée par la Cnsa (2) illustre bien qu’il n’est pas inutile de se poser la question :

[… le « répit » (en accueil de jour, hébergement temporaire en institution ou à l’hôpital) considéré isolément n’a pas fait la preuve de son efficacité sur le fardeau, la dépression, l’anxiété et la santé en générale de l’aidant. En revanche, les interventions multidimensionnelles comprenant entre autres du « répit » (soutien, conseil, éducation, information) ont montré des résultats plus positifs sur ces mêmes variables.
Ces résultats amènent donc à s’interroger sur l’intérêt du répit considéré isolément.].

Il y a effectivement deux façons de concevoir le répit :

  • Une respiration entre deux coulées : condition minimale pour se maintenir en vie et avancer le plus longtemps possible. On reprend quelques forces… et puis on repart comme avant dans sa navigation en solitaire, soumise aux aléas des vents.
    Avant/après : il n’y a guère de différence dans le vécu de l’Aidant. Il peut se dire satisfait de son répit, mais pour autant il n’aura pas introduit de changements salutaires dans sa relation d’aide.
  • Un temps de pause, accompagné de prise de distance et d’apprentissages qui permettent de se ressourcer et d’introduire, dans la relation d’aide, des changements positifs ancrés dans la durée. Pour cela le répit doit s’inscrire dans un système d’accompagnement, articulé autour du lieu de répit.

Bien évidemment c’est cette seconde conception que je soutiens. Si l’on veut donner au répit tout son sens et sa valeur, il faut l’assortir d’un réel souci d’efficacité pour l’Aidant, en lui permettant d’acquérir de nouveaux savoir-être et de nouveaux savoir-faire… et cesser de considérer le répit seul comme une fin en soi.

Un répit sans apprentissages et sans un soutien spécifique resterait une mesure isolée qui ne serait pas à même d’améliorer durablement la situation des Aidants concernés.

Pascal Jannot

(1) « Accueils de jour et hébergements temporaires pour les personnes atteintes de maladie d’Alzheimer : attentes, freins, et facteurs de réussite »
Centre Languedocien d’Etude et de Formation en gérontologie-34091 Montpellier cedex 5
Etude réalisée par : N. Blanchard, F. Crauste, M. Garnung, J-L. Bascoul, M. Aimonetti
Rapport rédigé par : N. Blanchard, M. Garnung
Etude financée par la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie
Mars 2010
(2) « Evaluation des structures de répit pour le patient atteint de maladie d’Alzheimer (et syndrome apparentés) et son aidant principal : revue de la littérature »
Toulouse : Inserm U558 (éditeur), 2008, 19 p., tabl., réf. 4p., FRA
Villars(H.), Gardette(V .), Sourdet(S.), Andrieu(S.), Vellas(B.)
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