Le salarié-aidant est la personne qui tout en ayant une activité professionnelle, assume un rôle d’aidant. Cette personne cumule donc une double charge, et doit très souvent faire face à une surcharge de stress.
Retenons deux chiffres, issus de deux études à grande échelle :
- celle de BVA-Fondation Novartis en 2010
- celle de la DRESS (Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques) « Handicap, santé, aidants au domicile » en 2008
- 46 % des aidants ont une activité professionnelle,
- 14 % des actifs sont aidants.
Les salariés-aidants en quelques chiffres :
En chiffres, cela signifie qu’environ 3,6 millions de femmes et d’hommes en activité doivent concilier vie professionnelle et accompagnement d’un proche dépendant (enfant, parent, conjoint)
L’étude pré-citée de BVA-Novartis indique que parmi ces salariés-aidants,
- 26 % ont dû s’absenter de leur travail hors des congés payés, à cause de leur rôle d’aidant (cela représenterait près d’un million de personnes)
- 30 % ont dû adopter des horaires flexibles, (cela représenterait plus d’un million de personnes)
- et 15 % disent avoir été pénalisés dans leur vie professionnelle du fait de leur rôle d’aidant (cela représenterait environ 570 000 personnes)
Les salariés-aidants quelles conséquences ?
Cette réalité statistique se répartit différemment en fonction de la taille des entreprises.
Pour l’aidant en revanche, elle se vit toujours de façon unique et singulière. Et les responsables ou les cadres d’entreprise ne connaissent pas toujours cette réalité vécue par leurs collaborateurs salariés-aidants.
Les conséquences pour le salarié-aidant :
- Une difficile conciliation de ses deux rôles entraînant : stress, épuisement, absentéisme.
Les conséquences pour l’entreprise :
- Une augmentation des risques psychosociaux, un absentéisme pouvant aller jusqu’à 16 journées par an pour 25 % de ces salariés-aidants, et souvent un présentéisme important.
Les droits du Salarié-aidant :
La loi a prévu des congés spécifiques dans certaines situations particulières :
Mais ces droits, qui s’appliquent lors de moments aigus de l’accompagnement, ne résolvent pas toutes les situations.
Des initiatives de dons de RTT ont vu le jour, mais si elles ne s’accompagnent de solutions de soutien à l’Aidant elles trouvent aussi leurs limites.
D’autres solutions, notamment de « Care management » permettent d’apporter à ces Salariés Aidant des solutions durables d’amélioration de leur condition.
La Maison des Aidants et le Centre d’Information et de Formation des Aidants, accompagnent régulièrement des salarié-aidants, à la demande de leur groupe de prévoyance ou de leur entreprise.
Une situation parmi tant d’autres, celle de Paul, permet d’illustrer concrètement les tensions typiques d’un salarié-aidant, et les moyens de les diminuer :
PAUL est employé comme vendeur
Il est aidant de sa mère âgée de 86 ans, atteinte de la maladie de Parkinson. Son père, 87 ans, est aussi en partie dépendant. Paul et son épouse habitent à plusieurs kilomètres de la maison des parents.
Malgré le plan d’aide à domicile, Paul est très sollicité pour accompagner ses parents. Il est souvent obligé de quitter de façon impromptue son poste de travail. Son employeur est compréhensif. Mais pour compenser ses absences, et ses arrêts maladie liés à un état de stress important, Paul effectue des heures supplémentaires. Cela renforce encore son épuisement.
Que peut faire l’entreprise pour aider Paul ?
La compréhension et l’accord de l’employeur permettent à Paul de faire face, mais le revers de la médaille est que Paul en fait toujours plus. Et sur ce point l’entreprise, même la plus compréhensive, ne peut pas régler les problèmes.
Dans le cas de Paul ni les aménagements consentis par son employeur, ni la compréhension de ses collègues ne pouvaient efficacement l’aider à soutenir cette situation de plus en plus épuisante.
A la demande du groupe de prévoyance dont relèvent Paul et son entreprise, il a été mis en place des ateliers-rencontres qui ont permis de reposer à plat toute la problématique.
Paul fait partie d’une fratrie. Mais il était l’aidant « désigné ».
Une partie du travail individuel fait avec lui durant l’action d’accompagnement a porté sur la répartition des rôles et des tâches dans la fratrie.
Au cours de l’action d’accompagnement :
- Paul a appris à demander,
- Il a appris à organiser et distribuer les tâches aux autres membres de la famille,
- Il a appris à contrôler l’exécution de ces tâches (par exemple demander et vérifier que celui ou celle qui se charge de la prise de rendez-vous chez le médecin, se charge aussi de commander le taxi qui va effectuer le transport).
- Il a appris à gérer son rôle d’aidant, en prenant du recul, en délégant, en acceptant de prendre soin de sa santé,
- Paul a pris conscience que son rôle d’aidant n’était pas une fatalité qui devait peser exclusivement sur lui.
Concernant son entreprise, il a suffi de convenir d’horaires réguliers qui permettent désormais à Paul de gérer son temps au travail et de gérer son implication d’aidant, désormais partagée avec d’autres membres de sa famille et de nouveaux professionnels du maintien à domicile.
On voit ici que si l’entreprise avait accepté, dans la très louable intention d’aider Paul, des aménagements de plus en plus nombreux, elle aurait en fait renforcer Paul dans le « faire toujours plus », alors que Paul devait apprendre à « faire autrement ».
En revanche, si les cadres dirigeants de son entreprise avaient bénéficié d’une sensibilisation sur les problèmes que rencontrent ses collaborateurs salarié-aidants un plan précoce d’accompagnement et de soutien pouvait être mis en place.
Et réduire les conséquences de la double charge de Paul.