« Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ». C’est une phrase d’Albert Camus que j’ai entendue prononcer plusieurs fois par Serge Guérin.
En fait, Serge Guérin insiste sur deux choses :
- ce qui n’est pas nommé n’est pas connu
- ce qui est mal nommé ne permet pas non plus d’avancer, ou pire, fait régresser
Et bien quand je vois comment la contribution informelle des aidants en France n’est pas nommée, quand je vois comment les « scientifiques » sortent des chiffres sur notre contribution informelle qui semblent extrêmement faibles sans les expliciter, et bien je trouve qu’on est en plein dedans : le malheur des aidants de voir le refus des politiques et des scientifiques.
Je reprends les mots mêmes de conclusion de cette économiste Marie-Eve Joël aux Rencontres scientifiques de la CNSA début novembre : « L’ampleur de la question des aidants appelle un investissement statistique et de recherche à la hauteur du problème. Faute de quoi l’injonction d’aider les aidants risque de rester sans suite ».
Concernant la contribution informelle des aidants, elle cite UNIQUEMENT des travaux qui datent de 2008 et qui évaluent cette contribution entre 7 et 11 milliards d’euros. Et pourquoi la contribution évaluée par Serge Guérin de 164 milliards d’euros par an n’est pas citée ?
Cette évaluation a été présentée depuis mars 2013. Elle n’aurait pas de valeur parce que Serge Guérin n’est pas un « scientifique » ? Moi, je ne suis pas une scientifique, mais quand on me dit qu’il y a 8,3 millions d’aidants en France, qu’on me dit que chaque aidant passe en moyenne 20 heures par semaine, et que le prix d’une aide professionnelle à domicile est de 19 euros par heure en moyenne, je sais faire la multiplication : 8,3 X 20 X 52 X 19 = 164 milliards.
Alors les 7 ou 11 milliards de 2008 me paraissent pas cohérents. Soit il s’agit pas du même nombre d’aidants, soit il s’agit pas du même nombre d’heures par semaine par aidant, soit il s’agit pas du même prix payé heure pour l’aide professionnelle qui viendrait à domicile remplacer l’aidant.
Moi, je ne suis pas une politique, mais quand je vois qu’aucun ministre ou qu’aucun secrétaire d’Etat n’a prononcé le chiffre même de la contribution informelle des aidants, cela me pose question. Ce qui n’est pas nommé n’est pas connu.
Heureusement, la conclusion de cette économiste lors des rencontres scientifiques nous indique la bonne direction : « L’ampleur de la question des aidants appelle un investissement statistique et de recherche à la hauteur du problème. Faute de quoi l’injonction d’aider les aidants risque de rester sans suite ».
Espérons que la CNSA décidera de mettre en œuvre une formule simple et représentative de la contribution informelle des aidants pour que les aides aux aidants mises en œuvre ne soient pas un « sans suite » aux yeux des aidants !
Emilie